Monde et énergie : quelles tendances depuis 10 ans ?

Par Karl Vallet


Cela fait 200 000 ans que l'homme arpente la Terre, 300 ans qu'il pollue son atmosphère en consommant les ressources des générations futures, 48 ans qu'il a prédit le phénomène du réchauffement climatique et 23 ans qu'il s'est donné comme objectif à la convention de Rio de produire plus propre pour consommer moins. Qu'a-t-il appris et entrepris depuis ? Quels progrès le monde a-t-il fait dans le domaine de l'énergie depuis ces dix dernières années ?

 

C'est en juin 2015 que le bilan énergétique mondial de 2014 est tombé, publié par la société française Enerdata. Chaque année, le bilan dressait des hausses constantes de la consommation énergétique mondiale. En 2004 celle-ci s'élevait à 10.9 Gtoe[i] et elle a atteint 13.4 Gtoe en 2014, soit une augmentation de 23% en seulement 10 ans. C'est pourquoi la première statistique remarquable de ce bilan est la stagnation historique de la consommation énergétique mondiale en 2014. En effet le G20 (80% de la consommation mondiale) habitué à des hausses de 2.3% entre chaque année, a augmenté sa consommation de 0.3% par rapport à 2013, entraînant une hausse de 0.5% pour l'ensemble du globe soit consommation totale de 13,4 Gtoe (graphique 1).


 

Cette stagnation provient en partie du bilan de l'Europe qui a connu l'une de ses plus fortes baisses jamais enregistrées, mais c'est surtout grâce au comportement de la Chine qui a, pour la première fois en 17 ans, stabilisé sa consommation d'énergie (graphique 2). Ce bilan, assez surprenant pour le pays ayant dépassé la consommation de l'Europe et des Etats-Unis ces dix dernières années, peut s'expliquer par les directions prises par le leader asiatique au cours de l'année 2014. Il a choisi de s'orienter vers une économie moins énergivore en stabilisant sa production d'acier et de ciment, ainsi qu'en améliorant l'efficacité énergétique de ses industries. De plus, le ralentissement de la croissance économique et la progression de l'hydraulique ont fait converger le pays vers ce résultat.



Concernant les sources de toute cette énergie consommée, le mix énergétique a finalement très peu bougé en 10 ans.

Si au sein du G20 le charbon devance le pétrole ce dernier reste bien sûr toujours la première source d'énergie au niveau mondial. Il a toutefois connu en 2014 une baisse de 50% des cours du barilcausée par différents facteurs cumulés tels que la surproduction et la flambée du dollar.

Nouvelle surprise de cette année 2014 pour le gaz : pas de croissance pour la première fois depuis 2001 (graphique 3), une stagnation sans doute provoquée par la chute historique de la consommation européenne de cette ressource : -11% par rapport à l'année dernière. Cette baisse impressionante concorde avec les tempérâtures élevées de l'hiver 2014 en Europe.

Quant au charbon, il a lui aussi subi une baisse de consommation, la première en 15 ans (hors crise) grâce à la chute de la demande en Chine (la première depuis 1999) et en Europe (graphique 4).

Rapidement développée dans le passé et notamment France, la production d'énergie nucléaire est en déclin relatif depuis 10 ans, passant de 16% de la production d'électricité mondiale en 2004 à 11.1% en 2014 (graphique 5). Cette diminution s'explique par l'arrêt définitif de huit réacteurs allemands et l'arrêt progressif de l'intégralité des réacteurs au Japon.








En ce qui concerne les énergies renouvelables, leur implantation a dynamique forte est de plus en plus mondiale depuis plusieurs années. Si le solaire a connu de forts investissements en Europe depuis le début de la décennie, il connait maintenant un fort ralentissement depuis 3 ans. Cependant, il se développe toujours de plus en plus dans le monde et l'année 2014 fut celle du Japon qui réalisé plus de 50% des nouvelles installations solaires du G20 (graphique 6). Pour l'éolien, le rythme d'investissement reste également soutenu notamment en Chine où 20 GW de nouvelles capacités ont été installées cette année (45% du G20) (graphique 7).



Nous avons donc pu observer une forte implantation des énergies renouvelables sur ces dix dernières années qui se concluent par une stabilisation de la consommation mondiale que l'on ressent par l'absence de croissance du gaz et une décroissance du charbon. Ces résultats constituent de réels progrès dans la consommation énergétique mondiale et nous ne pouvons qu'espérer qu'ils marquent le début d'une nouvelle ère énergétique.

 

 

 

 Pour aller plus loin :

Global Energy Statistical Yearbook 2015 : https://yearbook.enerdata.net/

 

 

 Notes :

[1]toe (tonne of oil equivalent) ou tep (tonne équivalent pétrole) : unité de mesure d'une énergie

1 toe = 41,868 GJ : correspond au pouvoir calorifique d'une tonne de pétrole "moyenne"

 

 

Écrire commentaire

Commentaires: 0